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Lutter contre la RAM en Indonésie : le rôle essentiel des éleveurs

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L’Indonésie fait partie des cinq pays où l’augmentation de l’utilisation des antimicrobiens est la plus élevée, selon l’Organisation mondiale de la santé. Les agriculteurs et les professionnels de la santé animale jouent un rôle clé dans la lutte contre la résistance aux antimicrobiens (RAM) et la protection de la sécurité alimentaire, en raison de leur impact sur la santé animale, environnementale et humaine.

Consciente de cet enjeu, l’Organisation mondiale de la santé animale (OMSA) s’est associée à deux éleveurs de volailles indonésiens, Aris Kumaidi et Galih Tantyo Yuwono, pour mettre en lumière leurs efforts en matière de lutte contre la RAM grâce à des pratiques agricoles durables et des mesures de biosécurité. 

Des traditions familiales à l’élevage professionnel

Aris Kumaidi, vétérinaire et éleveur de volailles de 42 ans, gère une exploitation de grande envergure à Bogor, dans la province de Java occidental. Comme beaucoup d’Indonésiens, sa passion pour l’élevage a commencé dès l’enfance, lorsque sa grand-mère lui a offert une jeune poule. Après avoir obtenu son diplôme à l’Institut agricole de Bogor (Université IPB), Aris a intégré l’industrie du poulet de chair en 2008 et poursuit cette activité jusqu’à aujourd’hui. Il supervise actuellement un cheptel de 1,2 million de poulets de chair avec une équipe d’environ 200 employés, fournissant de grands commerçants, courtiers, abattoirs et petits commerçants indépendants. 

Galih Tantyo Yuwono, 32 ans, a suivi les traces de son père, qui a commencé l’élevage en 1998. Inspiré par cet héritage familial, il a étudié l’élevage à l’Université de Gadjah Mada. Depuis 2015, il gère l’exploitation familiale à Bukit Cimanggu City, élevant 304 000 poulets de chair et approvisionnant des grands commerçants et entreprises. Son exploitation emploie actuellement 40 personnes. 

Confrontation à la RAM

Aris et Galih comprennent tous deux les impacts de la RAM sur l’élevage de volailles. Aris a découvert la RAM lorsqu’il a constaté que ses poulets ne guérissaient pas malgré les traitements antibiotiques, ce qui l’a incité à approfondir ses recherches. Bien qu’il n’ait pas été personnellement affecté par la RAM, il est conscient du poids financier et social que cela peut engendrer. 

Galih, quant à lui, a acquis ses connaissances grâce à des formations organisées par des entreprises pharmaceutiques vétérinaires et à sa participation à un programme de recherche dirigé par l’Université d’Utrecht et le Centre indonésien d’études analytiques vétérinaires (CIVAS). Encouragées par l’OMSA, ces initiatives collaboratives permettent de combler les lacunes en matière de connaissances et soulignent l’importance de la formation des éleveurs dans la lutte contre la RAM.

Bien que son exploitation n’ait pas été directement touchée par la RAM, Galih reconnaît le rôle crucial des éleveurs dans la prévention de sa propagation. Il considère même qu’il a une responsabilité dans la lutte contre la RAM en Indonésie, afin de protéger la santé animale et humaine. 

Biosécurité et responsabilité : des éléments clés pour lutter contre la RAM en Indonésie

La prévention des épidémies est une priorité pour les deux éleveurs, et les mesures de biosécurité occupent une place centrale dans leurs pratiques. Aris reconnaît que le maintien d’une biosécurité stricte peut être difficile en raison des habitudes des travailleurs. Pour y remédier, il organise des formations régulières et veille au respect strict des protocoles d’hygiène, soulignant que la prévention est la stratégie la plus simple et la plus rentable. Son engagement a permis d’améliorer la santé de ses volailles et d’augmenter ses revenus agricoles. 

Galih a également mis en place des protocoles rigoureux, comprenant le nettoyage des enclos avec du savon, l’application d’insecticides et de chaux, le traitement au formol et des pulvérisations régulières de désinfectant. Il s’appuie sur son éducation universitaire ainsi que sur son expérience pratique pour appliquer ces bonnes pratiques de manière efficace. 

Aris et Galih échangent activement sur la RAM avec d’autres éleveurs de volailles, encourageant une culture de responsabilité au sein de la communauté agricole. Bien qu’étant vétérinaire lui-même, Aris consulte d’autres vétérinaires pour diagnostiquer les maladies avec précision et utiliser les antimicrobiens de manière responsable. 

Galih, de son côté, fait appel à des vétérinaires pour identifier les traitements appropriés. En se procurant des médicaments auprès d’une entreprise de confiance, il garantit la qualité et l’authenticité des produits, réduisant ainsi le risque de contrefaçon. Ces approches prudentes de l’utilisation des antimicrobiens reflètent une tendance plus large vers une agriculture responsable, soutenue par de nombreux experts. 

Des éleveurs en première ligne contre la RAM

Malgré leurs avancées, des défis majeurs persistent. La gestion des ressources humaines, l’adaptation aux changements réglementaires et les fluctuations des prix du marché sont autant de difficultés auxquelles ils doivent faire face. Toutefois, Aris et Galih démontrent que les agriculteurs peuvent jouer un rôle essentiel dans la protection de la santé publique et la garantie de la sécurité alimentaire grâce à des pratiques agricoles responsables. 

Avec la croissance de l’économie indonésienne et l’augmentation de la demande en viande de poulet, leur rôle dans l’atténuation de la RAM devient encore plus crucial. Leurs parcours illustrent comment l’application de bonnes pratiques d’élevage et de mesures préventives, telles que la vaccination, peut considérablement réduire l’utilisation des antimicrobiens tout en améliorant la productivité. En adoptant ces mesures, les agriculteurs protègent non seulement leurs moyens de subsistance, mais contribuent également à renforcer les économies locales. L’OMSA rappelle qu’avec les bonnes pratiques, une agriculture durable est possible, au bénéfice de la santé animale et humaine.

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